Protection

P_WAC : l'association qui sauve les singes menacés d'extinction

Publié le
21/5/2018

A l'heure actuelle, la situation des Grands Singes d'Afrique est plus qu'alarmante. Les gorilles, les bonobos et les chimpanzés, qui appartiennent à cette catégorie, pourraient bientôt disparaître en raison des nombreuses menaces qui pèsent sur eux, telles que le braconnage et la déforestation.

Leur préservation, tout comme celle de leur habitat naturel, est d'une importance capitale, et de nombreuses personnes à travers le monde luttent pour leur survie.C'est le cas d'Amandine Renaud, primatologue et doctorante anthropologue, et fondatrice d'un projet conservationniste appelé P_WAC ("Project for Wildlife and Apes Conservation").

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Source : P_WAC

Axé autour du développement durable, de la participation citoyenne et de la préservation des animaux, c'est en République Démocratique du Congo (RDC) que son projet a vu le jour en 2013.Son ambition ? "Minimiser les conflits homme-faune sauvage en montrant aux populations locales (et internationales) la valeur économique d'une protection d'espèces menacées d'extinction".Aujourd'hui, et en exclusivité pour le Holidog Times, Amandine a accepté de nous parler de son projet, de son quotidien au Congo et de ses ambitions futures.

Les communautés locales au service des animaux

Pour Amandine, il ne s'agissait pas uniquement de protéger les Grands Singes menacés d'extinction. Son ambition est en effet bien plus grande, puisqu'elle met un point d'honneur à faire participer les villageois à la préservation des singes et de leur environnement.

J'avais travaillé pendant plusieurs années déjà sur des projets avec des chimpanzés, au Congo Brazaville, et j'avais également travaillé avec les bonobos en RDC sur une station de recherche. Et j'ai toujours aimé le terrain, mais je trouvais qu'il n'y avait pas assez d’interactions avec les villageois, et qu'on ne prenait pas assez en compte les populations locales. On leur donnait du travail, mais il n'y avait pas vraiment de partage. Du coup, c'est en 2013 que j'ai décidé de monter mon projet, et l'idée, c'était vraiment de mettre en place un projet de préservation des chimpanzés en impliquant les communautés locales, notamment les femmes.
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Source : P_WAC

La sensibilisation est donc au cœur de son projet. Car comme elle le dit elle-même, dans un pays ravagé par la corruption, les lois en faveur des animaux sauvages ne sont pas respectées. Il est donc vital d'éveiller les consciences au sort de ces espèces, le plus souvent braconnées pour leur viande.

Et il y a un manque d'informations cruel. Dans la zone dans laquelle on est, au départ, les gens ne savaient pas que les animaux étaient protégés. C'est juste bon à manger pour eux. Donc on essaie d'informer les villageois qu'il y a des animaux comme les chimpanzés qui font partie du patrimoine du Congo et qu'il faut les préserver et les protéger pour les générations futures.

Mais cet apprentissage se fait également en France, grâce aux bénévoles qui travaillent pour l'association, et qui animent des conférences sur le sujet.

"Les petits sont récupérés pour être vendus comme animaux de compagnie"

Si au Congo les singes ne sont pas encore acceptés comme étant une espèce protégée, c'est tout simplement parce qu'il sont le plus souvent perçus comme des biens comestibles ou vendables.

Il faut savoir que tous les animaux de la forêt sont chassés pour leur viande. Dans le cas des singes, les adultes sont chassés pour la viande, et les petits, qui sont en général accrochés aux bras de leur mère, sont récupérés pour être vendus comme animaux de compagnie. C'est les populations locales qui les mettent en cage, et ils servent de chiens de garde. Les primates sont des êtres territoriaux, donc il vont pousser des cris, vocaliser quand un individu rentre chez une personne. Donc si ça se passe mal, ils sont mangés. Ça c'est pour les petits singes. Les chimpanzés ont le même sort, mais ils coûtent beaucoup plus cher donc c'est souvent les populations locales aisées qui ont accès à ce genre d'animaux.

Afin de contrer ces pratiques, P_WAC missionne des éco-gardes, chargés d'assurer la sécurité des primates en sillonnant la forêt à la recherche de pièges, notamment.

Nous, en tant qu'ONG, on a pas le droit d'aller saisir les animaux. C'est les autorités locales qui le font, et ensuite ils nous confient les animaux pour la réhabilitation.

Un centre de réhabilitation pour primates

Mais que faire des animaux secourus ? Comment réapprendre à des singes chassés toute leur vie à vivre dans la nature, au milieu de leurs congénères ? Encore une fois, Amandine et son équipe de bénévoles savent quoi faire.

Sur le terrain, on a monté un centre de réhabilitation pour primates. C'est comme un centre de soins. On récupère des primates qui sont victimes du braconnage. [...] On a un centre en pleine forêt, une zone de quarantaine pour les animaux qui arrivent, pour éviter les transmissions de maladies. Puis passée la quarantaine on prend ces petits singes et on se balade avec eux en forêt pour qu'ils réapprennent la vie sauvage. Et en même temps, on est en train de construire une grande structure pour les chimpanzés, pour leur réapprendre la vie sauvage.

Actuellement, Amandine est en charge de deux femelles chimpanzés, Youyou et Mongo, secourues il y a peu, ainsi que de sept petites singes à queue rouge.

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Afin de récolter des dons pour construire un enclos pour les deux jeunes primates, ainsi que pour financer le salaire des gardes et autres villageois impliqués dans le projet, P_WAC participera le 17 juin, à Lyon, à la Course des Héros, organisée chaque année afin d'aider des associations comme celle d'Amandine à financer leurs projets.

"C'est le projet d'une vie"

Lorsque nous avons demandé à Amandine l'une des choses qui l'avaient le plus marquée depuis qu'elle habite au Congo, elle nous a répondu :

Au quotidien, ce qui me touche vraiment c'est par exemple ces petits singes qu'on récupère. Ils ont connu la chasse, ils ont vu leur groupe entier se faire tuer, ils ont connu l'attache sur la moto pour être vendus comme animal de compagnie, ils ont connu le stress de la rue, du monde hors de la forêt, et quand on arrive pour les récupérer, je ne sais pas s'ils le sentent ou pas, mais ils nous donnent toute leur confiance. C'est quelque chose qui me touche vraiment. Ils vivent plein de choses moches de la main de l'Homme, et dès lors qu'ils se sentent à l'aise, ils nous font confiance et on devient les mamans ou les papas de substitution. C'est assez incroyable.

Travailler sur un projet tel que celui-ci avec des chimpanzés et des singes de manière générale, c'est, comme le rappelle Amandine, "un projet à long terme, c'est le projet d'une vie".P_WAC a pour ambition de se développer, de sensibiliser d'autres personnes à la cause des Grands Singes, et d'obtenir plus de subventions afin de passer à une étape cruciale : professionnaliser le projet. Les dons récoltés servent par ailleurs à financer des enclos de réhabilitation, mais également les salaires des villageois et villageoises.Amandine aimerait par la suite pouvoir embaucher des femmes afin de cultiver des fruits dont se nourrissent les singes, mais également financer un projet social appelé "groupement rural pour les femmes".

Pour moi impliquer ce n'est pas juste donner un travail, c'est vraiment amener à ce que les personnes collaborent avec moi pour gérer le projet, et aient en charge des projets de leur côté aussi. Pour moi, c'est ce qui manquait dans les autres projets pour lesquels j'ai travaillé avant.
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Source : P_WAC

Si vous aussi vous souhaitez faire un don pour soutenir Amandine et son projet, vous pouvez le faire en cliquant ici.Pour de plus amples informations sur P_WAC ou sur la marche à suivre pour devenir bénévole au Congo, rendez-vous sur son site internet.